[Bertrand Tavernier sur le tournage des "Chroniques de...

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localisation Bibliothèque municipale de Lyon / P0759 FIGRPTP3655 04
technique 1 photographie positive : tirage noir et blanc ; 18 x 24 cm (épr.)
historique Cinquième jour de tournage pour Bertrand Tavernier et son équipe technique. Les "Chroniques de France" se poursuivent dans la Presqu'île, sur les toits...
historique Lyon deuxième, 15h30... Au niveau du 8, rue Auguste-Comte, on vient de terminer la dernière prise dans une allée. Depuis le matin, les techniciens s'affairent dans le secteur, sous les remarques et le demi-sourire un peu figé du maître Tavernier. Silhouette faussement débonnaire, mèche blanche et mains dans les poches, il s'informe, observe avec des curiosités d'enfant. Près de lui, jamais très loin, son assistant Daniel Borgeaud est l'image même de la concentration, presque de la tension, comme un second qui aurait l'oeil à tout, les pieds sur terre et l'esprit affûté. Traversée de la rue François-Dauphin, de la rue de la Charité pour la suite du tournage... Sur le toit du Sofitel, en plein vent. Les techniciens transportent le matériel léger, ascenseur jusqu'aux cuisines où les plats d'inox s'alignent à côté des cloches chromées. En file indienne, on continue de grimper, par des escaliers raides comme sur un bateau. L'équipe traverse la salle de "machinerie" qui commande les ascenseurs, après la verrière, arrivée sur les graviers du toit, rafales de vent et vue imprenable sur la vile. Une des vitres épaisses de la rotonde claque, tombe en morceau. "Non, je n'étais jamais monté, on a tout Lyon, là..." Bertrand Tavernier a le vertige "Horreur de la hauteur". Pendant que l'équipe installe la caméra sur un angle, il fait le tour, donne quelques indications : "La liaison des deux collines, l'axe du Rhône avec tous les ponts, vous me choppez le crayons". Massés autour de la caméra comme un mur humain pour protéger l'objectif du vent et éviter les tremblements d'image, les techniciens commencent à filmer en direction de la tour du Crédit lyonnais. "Lumière plate", selon Jean Auzer, le chef opérateur. Le preneur de son est agenouillé en bordure de toit, avec son micro-canon, casque sur les oreilles, il emmagasine les bruits : vent, rumeur de circulation... Face à Fourvière, Bertrand Tavernier parle de l'architecture de la basilique : "Mon père me l'a fait redécouvrir, Fourvière est une des grandes églises méconnues, j'y suis entré l'autre jour, il y a des choses surprenantes dans le style surchargé". La tour du Crédit lyonnais...? "Je n'en sais rien, ce n'est pas le plus atroce", regard en direction de la Croix-Rousse : "Je pense plus de mal des gros machins, ces barres qui cassent la perspective de la Croix-Rousse". Jean Auzer entraîne ses troupes au point culminant du Sofitel, l'échelle tremble sous le vent, derrière son capitaine à tête de marin breton, "l'équipage" suit, Bertrand Tavernier ne montera pas : "T'es allumé... J'ai le vertige, affreusement, cette terrasse-là me suffit". [Le 15 janvier 1988], le tournage se déroulait dans le Vieux-Lyon, d'autres images ont été tournées à Fourvière, sur les bords du Rhône... Le soir, l'équipe a filmé à la tombée de la nuit, à Perrache. Le père de Bertrand Tavernier sera de nouveau sur le tournage [les 18 et 19 janvier]. Ce jour-là, est prévue une interview de Pierre Mérindol dans le jardin du palais Saint-Pierre. L'équipe montée sur la rotonde tarde à redescendre... "L'autre jour, on est resté sur un balcon, on n'a plus arrêté de filmer, tout d'un coup tout devient intéressant... Il y a des changements de lumière incroyables... Plus je filme ça, plus je trouve que c'est une ville formidable". La journée [du 15 janvier], "pénible, avec cette pluie qui n'arrêtait pas. C'est le risque majeur sur ce tournage, impossible à contrôler. Les averses, c'est bien, ça peut donner des choses intéressantes, mais la pluie sans interruption... Aujourd'hui je retrouve le même temps d'automne que sur «Une semaine de vacances»". Tout le monde redescend. Devant le Sofitel, conciliabule pour savoir si le tournage se terminera là aujourd'hui. Finalement non : Bertrand Tavernier et Jean Auzer partent à pieds pour aller filmer le vieux théâtre de l'Eldorado. "... Et moi je te dis que dans vingt minutes on y est". La journée commencée vers 8 heures se poursuit jusqu'à la projection quotidienne des rushes, à FR3, d'une durée variable. La séance a duré deux heures [le 14 janvier]. Pour la version définitive, limitée à cinquante-deux minutes, Bertrand Tavernier devra encore couper et "faire court". Source : "Les vertiges de Tavernier" / Pascaline Dussurget in Lyon Figaro, 16 janvier 1988, p.64.

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